11 novembre 2003 - Rassemblement pacifiste à Gy-l'Evêque Yonne - Discours de Jean-Noël Guénard président de la Libre Pensée de l'Yonne

Citoyens, citoyennes, Camarades,

Mes cher(e)s Ami(e)s,

Je vous remercie d'être venus encore nombreux à notre désormais traditionnel rassemblement pacifiste organisé au pied de ce monument aux morts de Gy l'Evêque dont les inscriptions "GUEREE à la GUERRE" et "PAIX entre tous les PEUPLES" constituent véritablement 2 poings levés à l'adresse des guerres, de TOUTES les guerres, de leurs auteurs et de leurs profiteurs.

Aujourd'hui même, nous, Libres Penseurs et Pacifistes sommes également rassemblés dans la Creuse, autour du monument de Gentioux dont l'orphelin de bronze tend lui aussi fermement le poing devant l'inscription "Maudite soit la guerre". "Que maudite soit la guerre !" s'écrie de même la veuve éplorée tenant ses 2 orphelins sur le monument d'Equeurdreville, dasn la Manche. Nous sommes rassemblés à Dardilly, dans le Rhône, dont le monument proclame haut et fort sa haine de la guerre et revendique la "fraternité des peuples". Nous sommes rassemblés dans la Loire autour du monument de St-Martin-d'Estreaux dont les longues inscriptions dressent le Vrai bilan de la guerre, une hécatombe effroyable, tout en dénonçant "les fortunes scandaleuses édifiées sur les misères humaines, le poteau d'exécution pour des innocents et les décorations accrochées sur l'uniforme de brutes galonnées".

Les monuments que je viens d'évoquer, auxquels il convient de leur associer quelques dizaines d'autres parmi nos 36000 communes, sont rares, trop rares. Ils n'en consituent pas moins des gifles retentissantes pour les responsables de cette première Boucherie Mondiale qui, non seulement ont jeté les peuples les uns contre les autres durant 4 terribles années, mais ont voulu ensuite entretenir, le conflit terminé -mais les plaies de l'Humanité encore béantes- le mythe des braves poilus "morts glorieusement pour la Patrie" alors qu'ils avaient été véritablement menés à l'abattoir pour le plus grand profit des industriels et des marchands de canons.

Les initiateurs de ces monuments ont souvent dû subir les foudres des autorités réactionnaires de l'époque et, comme ici à Gy l'Evêque, les menaces de destitution des préfets. Ils furent la risée des va-t-en guerre. Ils durent même affronter parfois les violentes diatribes des curés qui, dans leurs bulletins paroissiaux, fustigeaient ces monuments qui constituaient un affront aux tenants de l'Union Sacrée proclamée sitôt le grand Jaurès assassiné.

Car l'Union Sacrée fut bel et bien cette cynique alliance du sabre de l'armée, du goupillon du clergé et du coffre-fort des industriels, alliance décrétée au son du clairon que remplacèrent rapidement le son des canons et le râle des mourants.

L'état major militaire voyait dans une "bonne guerre" l'occasion de redorer son blason après l'affaire Dreyfus qui avait singulièrement terni son prestige. Le clergé pensait, lui, reconquérir dans l'enfer des tranchées l'âme des hommes que les grandes lois laïques votées en France avaient égarées et déviées du droit chemin de ses églises. Quant aux industriels, quelle aubaine que la fabrique de ces millions d'obus pour relancer un capitalisme déjà sénile à l'époque !

Et que dire de l'attitude de certains dirigeants de syndicats et de partis ouvriers qui, sur le catafalque de Jean Jaurès, rejoignirent cette infâme "Union Sacrée". Ainsi, lors de l'enterrement de Jaurès, un discours était fort attendu par les prolétaires français autant qu'il était craint par les autorités et les bellicistes de tout poil : celui de Léon Jouhaux, dirigeant de la C.G.T. Allait-il, comme Jaurès, proclamer que le seul ennemi des travailleurs n'était pas le camarade d'Outre Rhin mais le patron qui l'exploitait ? NON : pour défendre "la République française contre l'Empire Germanique", Jouhaux choisit à son tour la partition du clairon.

Pendant 4 ans donc, les dirigeants qui, lors d'importants congrès internationalistes, avaient proclamé la nécessité d'unir les prolétaires de tous les pays, envoyèrent eux-aussi ouvriers et paysans sur les champs d'horreur. Certains éminents socialistes comme Jules GESDE se montrèrent particulièrement zélés et constituèrent d'excellente caution pour la politique guérrière en acceptant des postes de ministres d'Etat nommés sans portefeuille particulier. Ils étaient ministres, c'est tout. Ministres d'états, ministres de rien, mais surtout ministres d'un gouvernement en guerre afin de montrer au peuple la seule direction à suivre : le front, ce grand broyeur d'hommes et d'espoirs et dont ils étaient devenus, eux ministres de rien, pourvoyeurs en chair à canon...

Dans le même cas, on peut également citer le socialiste Marcel Sembat. Quant au député socialiste Albert Thomas, il sera nommé en 1915 au poste plus pragmatique de ministres d'Etat à l'Armement et à l'Equipement militaire. Il s'illustrera en mettant en place dans les usines d'armement des comités de travail qui assureront l'intégration des syndicats dans la vie de l'entreprise, rompant ainsi avec la tradition française de lutte des classes. Cette évolution offrira au gouvernement la garantie qu'aucune grève ne vienne paralyser la production...

Il y eut cependant des voix discordantes. Elles aussi furent rares, trop rares et pour cette raison n'en méritent pas moins d'être citées.

En Allemagne, seul le député socialiste Karl LIEBKNECHT refusa, très tôt, de voter les crédits de guerre, considérant que dans ce conflit monstrueux, il n'y aurait jamais ni vainqueurs ni vaincus, mais que tous les pays seraient saignés, ruinés, épuisés et que, si par malheur il se trouverait des vainqueurs exaspérés et des vaincus irrités, la guerre recommencerait pour la vengeance, pour la revanche. Quelle lucidité de sa part ! Et quelle clairvoyance !

En France, nous avons eu les députés Brizon, Blanc et Raffin-Dugens qui, eux également, finirent par refuser de voter les milliards que demandait le gouvernement pour prolonger cette guerre d'extermination. Comme Karl Liebknecht, ils ne voyaient qu'un seul moyen d'empêcher les guerres futures : la Victoire, aussi bien en France qu'en Allemagne et dans tous les pays du monde, du Socialisme sur les gouvernements et les hommes de proie. Il va s'en dire que les déclarations de ces trois hommes à la Chambre des députés se faisaient au milieu du tumulte, des injures, vociférations, des menaces physiques et des voies de faits. Par contre, elles trouvèrent un écho très favorable au fond des tranchées chez les soldats exténués et écoeurés par ces longues années de guerre.

 

Mes chèr(e)s Ami(e)s,

Nous ne connaissons que trop l'atroce bilan de cette boucherie : 10 000 000 de morts, l'Europe transformée en une immense fosse commune, des millions d'invalides, des gueules cassées, des traumatisés à vie. Des millions de veuves et d'orphelins. des chiffres, rien que des chiffres ? Mais si tous les morts français défilaient en rang par quatre pour le 14 jullet, il ne faudrait pas moins de 6 jours et 5 nuits avant que le dernier ne nous montre sa face livide ! Quant au coût financier, il n'en révèle que davantage l'absurdité et la vénalité du système capitaliste : canons, obus et toutes les armes utilisées dans ce conflit coûtèrent 2500 milliards de francs et pour ce prix, chaque habitant d'Europe aurait pu recevoir une petite maison de 4 pièces... ! C'est à l'aulne de ce bilan que l'on peut apprécier comment Jaurès avait raison lorsqu'il déclarait aux gouvernements et aux exploiteurs :

" Votre société violente et chaotique porte en elle la guerre comme une nuée dormante porte l'orage. Oui le capitalisme c'est la guerre."

Et on ne peut qu'apprécier également comme cette sentence a conservé de nos jours toute son actualité.

Alors que tous les grands de ce monde utilisent le génie humain pour produire les pires armes destructrices et le budget de leur pays pour fabriquer bombardiers , porte-avion et sous-marins atomiques, on décrête du côté du FMI de la Banque Mondiale que le Sida ne pourra jamais être éradiqué et la famine vaincue en Afrique avant plusieurs décennies !

Mais quel affreux cynisme faut-il pour prôner que les productions militaires prévalent financièrment sur l'avenir de millions voire de milliards d'individus ?

Et qu'observons nous, nous pacifistes, à travers la lunette fixée sur l'actualité ?

Nous voyons Bush, décidé à mener une guerre totale contre le genre humain mais qui ne parvient plus à s'extraire du bourbier d'un conflit qu'il a lui même provoqué et qu'il avait jugé hâtivement terminé après quelques victoires.

Nous voyons Poutine, le nouveau tsar de toutes les Russies, le boucher le Thétchénie, reçu en grandes pompes par Chirac et par Berlusconi, ce dernier reprenant le leitmotiv du Kremlin en déclarant "que la Tchécthénie est un repaire de terroristes et que Moscou tente réellement d'y rétablir le droit". Le tapis rouge déroulé par ces tartuffes sous les pieds d'un tel bourreau ne peut qu'évoquer pour nous la couleur des flots de sang qui coulent actuellement en Tchétchénie.

Nous voyons s'édifier autour des Palestiniens un long mur impitoyable, un véritable mur de la honte que conspuent même bon nombre d'Israëliens. Et si toutes les guerres sont autant d'insultes et de coups portés au visage de l'Humanité, sachez bien que ce mur constitue quant à lui une nouvelle cicatrice déchirant notre planète.

Nous voyons défiler des guerres sur tous les continents. Des guerres sales des sales guerres que ne sauraient faire oublier la haute technologie militaire qui, elle, ne veut entendre parler que de guerres propres et de frappes chirurgicales.

Nous découvrons des guerres cachées, des guerres lointaines. Qui sait vraiment que dans les Iles Salomon, Chapelet de terres éparpillées dans l'océan Pacifique, 20 000 personnes ont été tuées ces deux dernières années par la guerre civile?: une véritable saignée pour ce petit pays qui aurait dû rester une contrée paradisiaque.

Et en France , qu'en est-il?

en France, comme dans de nombreux pays, une autre guerre, une guerre économique a été déclarée contre les travailleurs et les travailleuses. Déjà les retraites sont passées dans la moulinette Chirac-Raffarin. Bientôt cela sera au tour de la Sécurité Sociale. Le MEDEF quant à lui licencie à tour de bras. Enfin, la loi de Régionalisation-Décentralisation va faire éclater l'unité de la République et l'égalité des droits des citoyens et développer les communautarismes

Oui, pour tous les pacifistes de tous les pays, la tache semble plus que jamais immense. Mais tout aussi immense était il y a quelques mois nos manifestations contre la guerre en Irak.

Si nous étions pessimistes, nous croirions volontiers, au vu de toutes les forces destructrices dont disposent les militaires que nous ne vivons pas en 2003 après Jésus-Christ
mais en l'an 58 après Hiroshima. Cependant en irréductibles optimistes que nous sommes,nous préferons nous rappeler que nous sommes en l'An 213 de la Révolutions Française ou en l'an 132 de la commune de Paris, événements qui ont fait vaciller les vieilles têtes couronnées et trembler les bourgeoisies naissantes en portant très haut le flambeau des idéaux d'internationalisme et de fraternité entre les peuples.

Aussi mes chers amis, je vous invite , comme le fait pour l'éternité et la postérité notre cher orphelin de Gentious, à lever le poing en clamant votre dégôut de la guerre et de toutes les guerres :

"Guerre à la guerre !"

"Guerre à toutes les guerres, leurs auteurs et leurs profiteurs ! " Paix et Fraternité entre tous les peuples !

Vive la République laïque Une et Indivisible !

Vive la République Internationale des Travailleurs !

A bas la calotte ..........et vive la Sociale !

 

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