Thomas Woodrow WILSON, la « Société des Nations », et les guerres - Par Hélène Sordet
T.W. Wilson, président américain, au moment de la première guerre mondiale a eu le grand honneur de faire l’objet d’un ouvrage écrit par Freud et Bullit.
Bullit , diplomate américain, membre de la délégation des Etats Unis, à Versailles,
avait publiquement exprimé son désaccord sur le comportement lamentable du président Wilson lors des négociations du traité, lui reprochant d’avoir lâchement cédé à toutes les exigences du dépeçage austro-hongrois, dans le seul but de faire accepter le principe de fondation de la ?Société des Nations?, création intellectuelle de Wilson.
Quant à Freud, qui a participé avec d’autres, Charcot, Janet, au développement de la science positive, mettant fin à toute croyance aux puissances surnaturelles, il ressentait toute la dévastation de l’Europe après la première guerre mondiale ; il haïssait Wilson.
Il n’a rien connu des camps d’extermination où ses quatre sœurs vont mourir, puisqu’il est mort par euthanasie demandée à son médecin ; Freud était un véritable athée ; il considérait la religion comme une névrose.

Le livre sur le président Wilson sera donc co-écrit en 1929, par Bullit et Freud, et ne paraîtra qu’en 1961, à la mort de Mme Veuve Wilson.
Wilson y apparaît comme ?un anti-diable?, ?un nouveau christ?, bref ?un dangereux illuminé?.
Freud voit chez Wilson une ?mégalomanie religieuse?.
Le futur candidat ne disait-il pas à l’époque : « Dieu, voulait que je fusse président des États Unis. Ni vous ni aucun mortel ou groupes de mortels aurait pu l’empêcher. »
Freud voyait rouge : ? Je ne peux m’empêcher de penser qu’un homme qui peut interpréter les illusions de la religion d’une manière si littérale et qui est sûr d’entretenir des rapports intimes avec le Tout Puissant n’est pas fait pour s’occuper des hommes ordinaires. ?
Freud et Bullit dessinent le portrait d’un Wilson, bigot au visage diabolique : ?affreusement laid, tellement affecté par ses oreilles décollées qu’il les fit effacer sur les portraits officiels.
Enfant chéri d’un père pasteur, et d’une mère distante, le garçon disgracié choisira d’être homme d’état très tôt?.
Parti des révérends pères, le petit Thomas passe par le père et parvient à l’état de Père de la nation, en raison d’un narcissisme sans mélange, de l’idéal religieux de papa, et surtout d’un féroce déni de la réalité.
Pacifiste, il résiste à l’entrée en guerre des États Unis, et ne s’y résout qu’au prix d’une idée, la « Société des Nations », dont la finalité était de régler les conflits entre les nations, de garantir l’intégrité territoriale et l’indépendance des états, et éventuellement des sanctions.
Lors du traité de Versailles, où les alliés imposent leur loi, sans inviter ni les russes ni les vaincus, Wilson occultera totalement le démantèlement austro-honrois par Clémenceau : l’occupation de la Rhur, les sommes énormes réclamées à l’Allemagne, l’attribution des Allemands des Sudètes à la Tchécoslovaquie, ce qui fera plus tard le lit d’Hitler…
Perclus de malaises et d’incertitudes, il restera aveuglé par cette « Société des Nations » intégrée au Traité de Versailles le juin1919, entrée en vigueur le 20 janvier, et à laquelle, cruelle humiliation, son propre pays n’adhérera pas.

Ultérieurement, l’histoire ne sera pas moins tragique, ?la Société des Nations ? observera la seconde guerre mondiale avec un attentisme affligé, malgré les 50 millions de morts ; elle sera dissoute en avril 1946.
Puis sera relancée sous forme d’Organisation des Nations Unies, dont le siège sera à New York : ?ONU ?, qui provient de la charte des Nations Unies , traité international signé le 26 juin 1945, après avoir été souhaité par Roosevelt. Les objectifs sont, faut-il le rappeler, - le maintien de la paix et de la sécurité intérieure, - le développement de relations amicales entre les nations et la coopération économique, sociale, culturelle et humanitaire - le renforcement du respect des droits de l’Homme et des liberté fondamentales.
Cela n’empêchera pas ?l’ONU? et sa force armée, d’entériner les autres conflits, guerres, génocides de la fin du siècle dernier ;
De 1900 à 1945, on ne dénombre pas moins d’une dizaine de guerres entre états nations (de la guerre russo-japonaise de 1905 aux guerres balkaniques ou à la guerre du chaco entre Bolivie et Paraguay en 1935). Au XXe siècle une centaine de millions de morts perdent la vie en raison des guerres, et plus de trente millions après 1945. Les deux guerres engagèrent des états majeurs de la planète – 12 à 13 millions de réfugiés après la deuxième guerre mondiale - Et les deux derniers siècles ont vu s’étendre le système de compétition instaurée par l’Europe à tous les autres pays, et reprise par les États Unis depuis 1945 : soit une trentaine de conflits inter étatiques dont les guerre israélo-arabe, indo-pakistanaises, guerre de Corée, du Vietnam, conflit anglo-argentin, Iran Irak, Yougoslavie, Afrique, Asie centrale, Tchétchène, et enfin l’Irak….
L’hégémonie militaire des Etats-Unis imprime un état de guerre plus ou moins permanent, sous couvert d’une paix par l’Empire, avec le plus souvent, le relais ambigu de l’?ONU?.
N’oublions pas que les États Unis, sont un adversaire déterminé de la cour internationale de justice créée dans le cadre de l’?ONU?, afin d’assurer l’immunité de l’ensemble de ces militaires servant à l’étranger, puissent agir en toute impunité (cf Le Monde du 1e juillet 03)
.La vieille Europe, belliqueuse depuis le Moyen-âge, qui craint depuis 2000 ans, le chaos amené par une hypothétique invasion barbare extérieure, perpétue tout autant l’esprit de guerre (guerre congolaise, conflit en Côte d’Ivoire, ect…).

Alors que la guerre prend d’autres visages, plus insidieux, moins frontaux, la destruction à grande échelle des systèmes de protection sociale, des retraites, la destruction des emplois, l’ébranlement de tout un système industriel : l’OIT annonce 20 millions de chômeurs supplémentaires dans le monde au moment où les délocalisations se multiplient, les fermetures d’usines, les plans de licenciement.
Les présidents américains prononcent leur serment sur la bible, Clinton se confessera en public, et Bush commentera l’évangile avec ses ministres à la maison blanche…
Et l’on continue de réfléchir au pentagone, depuis les difficultés avec la Turquie avant l’invasion en Irak, sur les meilleures armes possibles ? les drones supersoniques, pour pouvoir bombarder n’importe où dans le monde en moins de deux heures ? (cf Le Monde du 5 juillet 03)

Ces réflexions sont issues de l’ouvrage passionnant de Catherine Clément : Les révolutions de l’inconscient.
Édition Les reflets du savoir ; 2001.

Le président Thomas Woodrow Wilson par Sigmund Freud et William C. Bullit ; Payot ; « coll. Petite bibliothèque Payot » ; 1990.

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